Même si la science a déja prouvé que la loi des séries n’existe pas, il faut avouer que la redondance d’accidents aériens sur une si courte durée rend nerveux toute personne rationnelle qui s’apprête à prendre l’avion.
Il y a une semaine, un B777 de la Malaysia Airlines était abattu par un missile au dessus de l’Ukraine. Rationnellement, vous savez que cela n’a aucun effet sur la sécurité de l’avion que vous prendrez demain puisque ces missiles ne sont disponibles nulle part en dehors de cette zone.
Il y a quelques jours, un ATR-72 de la compagnie TransAsia se crachait à l’atterrissage, probablement en raison d’un typhon… les pilotes peuvent atterrir sur des pistes dans des conditions extrêmes, mais il existe des limitations. Par exemple, un avion de ligne classique peut se poser sur une piste sèche avec du vent venant de travers à 70 km/h. Les pilotes sont formés pour cela et ils le font tous les jours. L’enquête nous dira si les limitations de l’avion et de la piste ont été respectées.
Aujourd’hui, un MD-83 de la compagnie espagnole SwiftAir opéré par Air Algérie vient de s’écraser quelque part au Nord du Mali. Encore une fois, on est sur un événement ponctuel, unique, l’avion cessant de communiquer avec le sol instantanément. La cause technique est rapidement écartée, puisque les avions n’explosent pas en vols sans raison (surtout un avion bien connu et qui a été produit depuis la fin des années 60 jusqu’au début des années 2000 – l’avion qui s’est crashé avait 18 ans). Même en cas de panne de tous les moteurs, un avion va planer des dizaines de minutes sur des centaines de kilomètres, laissant tout le temps au pilote d’avertir les opérations aériennes de sa situation. Le missile identique à celui utilisé en Ukraine est exclus, ce type de missile ne fait pas partie des matériels en possession de groupes terroristes de la bande sahélienne.
Reste donc l’éventualité d’un attentat ou d’une désorientations spatiale des pilotes. Pour des pilotes européens, sur un avion de cette catégorie, l’éventualité semble peu probable. Ne vous laissez pas avoir par les médias : le fait qu’un avion fasse un évitement sur une zone dans laquelle il n’est pas contrôlé avec un radar mais uniquement avec une radio est tout à fait normal. De même, un évitement météo ne pose pas de soucis de sécurité, l’avion faisant par exemple un détour pour ne pas traverser un cumulonimbus. C’est justement cette opération qui permet une sécurité totale.
On parle ici de tempête de sable. A 10 000 mètres d’altitude cela n’affecte pas l’avion, et dans le pire des cas les moteurs peuvent tousser voire s’éteindre… mais on revient au cas de la panne de moteur : l’avion va planer. Cette situation n’est pas que théorique, des avions qui ont traversé des nuages de cendres volcaniques ont déja rencontré cette situation et ont pu planer des dizaines de minutes, jusqu’à ce que les moteurs se rallument en sortant de la zone.
Je détaillerai dans un prochain article ce qu’il se passerait si un avion entre dans un cumulonimbus. Le temps presse, je pars sur le plateau de France 24, puis Europe 1 puis LCI… je finirai ce message dès que possible !
Xavier
Après deux jours médiatiquement très intenses, la suite a été écrite, elle est ici
Merci Xavier, effectivement avec toutes ces catastrophes aériennes à la chaîne, je me raccroche plus que jamais à ce que vous nous aviez expliqué en stage. Cela crée un stress supplémentaire juste avant les vacances et donc la prise d’avion 🙁
L’absence de com radio n’implique pas forcément une explosion en vol (même si les relations Algérie-Sahelistan, la volonté de frapper un vol avec bcp de français dont le pays tape la franchise islamiste assez intensément depuis 2 ans cumulé à la sécurité à l’embarquement des aéroports africains donnent des raisons d’être pessimiste):
Le md-80 (pour rester sur un modèle similaire) crashé avec des antillais au Venezuela dont le cdb avait été aussi bon à identifier/rattraper un décrochage que ceux en charge de l’AF447 (au point de se demander si le premier apprenti pilote du dimanche venu, a peine lâché du haut de ses 10 heures de vol maxi, n’aurait pas fait mieux!): Tous n’avaient pas été très loquaces a la radio!
La charge de travail est alors intense et faire la causette pas forcément la priorité.
Et ceux qui y arrivent encore dans une sale situation (tel l’A320 magistralement posé en plané, puisque l’article en parle, dans l’Hudson), c’est du bref!
Même face a un controlleur qui n’a manifestement pas pigé la réalité de la situation et la seule option raisonnablement possible et aurait pourtant pu s’avérer perturbant, au dessus d’un des endroits les plus denses du monde au sol comme en vol ou il est prudent d’annoncer ses intentions afin de ne pas risquer de ne bouffer que de la Bernache!
Ca sert à quoi d’appeler au secours au milieu de nulle part quand 5mn après tout sera fini si le problème est mal géré? Au pire, une balise ou un acars fait/fera le job si cela s’est mal passé.
Bonjour et merci pour ce message détaillé. En effet, les rares décrochages documentés n’ont avant tout pas été perçus par les pilotes. Cette option est aujourd’hui exclues (voir le dernier article du blog). Il est également clair que la première des priorités pour un pilote en difficulté, c’est de rétablir une situation saine, et ensuite il prendra son micro.
L’amerrissage de l’Hudson est un bel exemple de rattrapage d’une situation critique, et à ma connaissance la totalité des avions s’étant retrouvés en situation de plané ont eu le temps d’avertir le sol, à la fois pour avertir le sol et faire dégager la piste.
L’article n’avait pas été finalisé ni relu avant édition, d’où ces quelques imprécisions.
Cdt,