Voila une question qui revient très souvent… et la réponse pourrait tenir en trois lettres : oui ! Historiquement, les tout premiers avions sont d’ailleurs des planeurs que des ingénieurs ont poussé du haut de falaises pendant le 19ème siècle. Évidemment avec ces technologies on ne va pas bien loin, mais des planeurs de plus en plus grosse taille ont été développé, notamment par l’armée. Le débarquement des alliés en Europe à partir de 1942 a par exemple été l’occasion de voir des milliers de planeurs être tractés par des avions à moteur, puis largués en haute altitude à des dizaines de kilomètres de leur cible. Le but était clair : rester discret et transporter du matériel lourd ou des renforts aux parachutistes. Jusqu’à 1300 planeurs ont ainsi été largués lors de la seule opération Varsity de mars 1945, certains ayant la capacité de transporter 8 tonnes de matériel ou plusieurs dizaines de soldats. Le plus gros planeur de tous les temps, le XCG-20, atteignait même une masse maximale de plus de 30 tonnes !
On le voit, le concept même de l’avion qui plane n’est pas nouveau, mais il s’agissait d’avions spécialement conçus pour cela. Mais qu’en est-il pour un avion de ligne ? La question ne s’était pas vraiment posée, car on partait du principe que les moteurs de l’avion devaient toujours être capable de lui donner la vitesse nécessaire pour voler. D’ailleurs, tous les avions avaient toujours 3 ou 4 moteurs juste « au cas où ». Puis il y a eu la Caravelle, un avion français extraordinaire équipé de seulement deux moteurs. Sauf que dans les années 50, l’idée d’un avion de ligne qui plane ne s’est jamais posée, et la simple idée qu’un appareil serait capable de se maintenir en vol avec un seul moteur rend tout le monde dubitatif. Sud Aviation et Air France proposent donc une démonstration, et des dizaines de journalistes embarquent à bord de l’appareil le 15 avril 1959.
La Caravelle s’élance depuis l’aéroport d’Orly et coupe même un de ses deux moteurs lors de la montée. L’avion monte ainsi avec seulement un seul réacteur jusqu’à l’altitude de 13.000 mètres (et oui : tous les avions sont capables de décoller sur un moteur, même les avions « à hélices »). Arrivé à cette altitude, les pilotes coupent le deuxième moteur et c’est le début du vol plané. Celui-ci durera très exactement 46 minutes et permettra à l’avion d’atterrir sur l’aéroport de Dijon situé à 265 kilomètres de là. Il faut bien comprendre que ce ne sont pas les moteurs qui vont voler l’avion, ce sont en fait ses ailes. Tant que l’avion a de la vitesse, l’air s’écoule au dessus et en dessous de son aile et il est capable de voler. Si les moteurs ne fonctionnent pas, on ne peut pas maintenir sa vitesse en gardant son altitude et on se met donc en descente. De la même manière qu’un vélo va garder une certaine vitesse en descendant une colline, un avion va maintenir une vitesse pendant sa descente et peut donc toujours avoir un flux d’air sur ses ailes, ce qui lui permet de voler. Si les moteurs arrêtent de fonctionner, on ne tombe donc pas comme une pierre puisque l’on ne perd pas toute sa vitesse, l’avion gardant beaucoup d’élan.
La capacité de planer d’un avion s’appelle la finesse, et les avions de ligne comme les Airbus A320 ou les Boeing 737 ont une finesse autour de 20. Cela signifie que lorsque l’avion descend de 1 mètre, il avance de 20 mètres. Quand l’avion vole à 10km d’altitude, il peut donc planer sur environ 200 km. Il faut donc toujours se trouver à portée de planer d’un aéroport ou d’un terrain plat (comme un champ) pour pouvoir y réaliser un atterrissage (ou un amerrissage si seul un plan d’eau est disponible). Précisons par ailleurs que les avions ont pour certain une finesse qui dépasse les 30 (on plane à plus de 300 km quand on vole à 10 km !) et qu’un avion qui plane reste tout à fait manœuvrable puisque ses virages sont également réalisés grâce aux flux d’air qui s’écoulent sur ses gouvernes… même sans moteur, un avion est donc capable de faire des virages et d’atterrir en douceur.
Heureusement pour nous, la probabilité de subir une panne moteur est aujourd’hui inférieure à une tous les 1000 milliards d’heures de vol, il est donc peu probable d’avoir à affronter cette situation. Mais depuis une cinquantaine d’années, plusieurs pilotes ont eu l’occasion de prouver qu’un avion est bien capable de planer. Voici les exemples récents les plus connus :
– le Boeing 767 de Air Canada (connu sous le nom de Gimli Glider) en juillet 1983, a pu se poser sur une base militaire désaffectée après une panne d’essence liée à une erreur de conversion entre les litres et les livres…
– l’A330 d’Air Transat entre le Canada et l’Europe obligé de réaliser en août 2001 un atterrissage aux Açores après plus de 20 minutes de vol plané, une fuite de carburant (liée à un défaut de maintenance) et une succession d’erreurs (mauvaise application des check list par les pilotes) ayant conduit à une vidange plus rapide des réservoirs… (désormais, les pilotes doivent vérifier régulièrement si la consommation de carburant théorique correspond à la quantité de pétrole restant dans les réservoirs),
– l’amerrissage du fleuve Hudson au cours duquel un avion perd l’usage de ses moteurs juste après le décollage, l’obligeant à à réaliser un amerrissage (voir vidéo suivante).
Retenez donc bien trois éléments :
– non, vous n’aurez pas à vivre un vol plané car les moteurs sont fiables,
– si nécessaire, votre avion est capable de planer et il ne tombera pas,
– la réglementation impose de toujours se trouver à portée de vol plané d’un aéroport (ou d’un plan d’eau).
Volez donc heureux !
Un petit bonus, peut-être connaissez vous la navette spatiale américaine ? Savez-vous qu’elle n’avait aucune propulsion ? Toute la descente se faisait donc « en planant » ! Voici une vidéo assez sympa de l’un de ces atterrissages :
Bonjour,
Je vous cite :
« Quand l’avion vole à 10km d’altitude, il peut donc planer sur environ 200 km. Il faut donc toujours se trouver à portée de planer d’un aéroport ou d’un terrain plat (comme un champ) pour pouvoir y réaliser un atterrissage (ou un amerrissage si seul un plan d’eau est disponible). »
Et quand on se trouve au plein milieu du Pacifique ? L’avions peut flotter indéfiniment ?
Merci de votre réponse
Bonjour, la réponse est oui, en tous cas plusieurs semaines de flottaison 🙂
Sinon, il y a à bord des radeaux collectifs et des systèmes de survie permettant d’attendre les secours. Mais l’élément principal reste l’idée qu’un avion en vol de croisière n’aura pas de panne de tous ses moteurs !