Après cinq années d’efforts conjugués des enquêteurs mandatés et de milliers de bénévoles passionnés et malgré les 200 millions de dollars investis dans des recherchés sous marines, la disparition du vol MH370 de la Malaysia Airlines reste un mystère. Toutes les pistes ont été investiguées et le rapport final publié en 2018 conclut qu’il est impossible de définir si l’avion a subi des avaries ou un détournement. A moins qu’un nouvel élément probant n’apporte une indication sur une nouvelle zone de recherche, rien ne permet d’espérer que l’on retrouve un jour l’avion. Le calvaire continue donc pour les proches des victimes en quête de réponses, d’autant que l’enquête est tout sauf exemplaire… Voici une liste non exhaustive des erreurs relevées au cours de ces cinq années.
1) Les données fausses ou retouchées
La photo des deux iraniens présents à bord de l’avion et utilisant des passeports volés a fait le tour du monde. D’abord suspects, les deux hommes s’apprêtaient en fait à immigrer en Europe et ne présentaient aucun danger. Mais regardez bien leur photo fournie par les autorités :
Le bas de l’image est le même… un montage d’une si piètre qualité est étonnant, pourquoi avoir réalisé cette modification ?
De même, la retranscription exacte des derniers mots entendus à la radio était erronée. Au lieu de « Good night Malaysian three seven zero.« , la dernière émission était « All right, good night. » Et l’identité de la personne (commandant de bord ou copilote) qui a prononcé ces mots a elle aussi été révisée plusieurs fois… Ces deux éléments ne changent rien à l’enquête, mais comment avoir confiance quand des erreurs de ce type sont possibles ?
2) Les analyses officielles sujette à caution
Alors que l’avion est recherché à l’endroit où il a envoyé sa position pour la dernière fois (près du point IGARI), les autorités malaisiennes ne révèlent qu’après 3 jours que les radars militaires ont en fait suivi un écho qui s’avère être le MH370 pendant encore plus de 45 minutes. Comment expliquer qu’il faille 4 jours pour vérifier des données enregistrées et découvrir que l’on cherche au mauvais endroit ? Est-ce que quelqu’un regardait ces radars la nuit de la disparition ?
Les données radar de la Malaisie seront d’ailleurs rapidement mises à mal : l’écho suivi sur la deuxième partie du parcours serait en fait celui d’un autre avion qui passait par là, le vol EK343. Deux autres versions de cette succession d’échos sont encore publiées, et ce n’est qu’une année après la disparition que les données radar définitives sont disponibles. Un an pour ces analyses, c’est excessivement long. D’autant que tout ne semble pas crédible, même les rapports officiels australiens affichent ouvertement leur scepticisme sur la validité de l’ensemble des points proposés, seule le début du trajet semblant fiable.
De la même manière, l’analyse du simulateur de vol du commandant de bord a amené les enquêteurs à penser qu’il s’était entraîné à faire voler son avion vers le sud de l’océan indien. Une deuxième analyse des données avait finalement montré qu’il n’en était rien, des signes négatif avaient été oubliés lors de l’analyse de la trajectoire…
Et que dires des affirmations de hauts gradés qui révèlent leur sentiment personnel mais nécessitent des démentis officiels… un ancien directeur de la police indonésienne, le chef d’état major de l’armée de l’air malaisienne ou les données affichées pour les familles devront être ainsi corrigés. Avant d’être finalement confirmées pour certaines !
3) Un timing déraisonnable
Nous l’avons vu, le temps nécessaire à l’analyse du radar était long, mais c’est également le 12 mars que l’on apprend par que l’avion a continué à échanger avec le satellite de communication Inmarsat pendant encore plus de 6 heures… Aucune des deux zones de recherche fournies par les radars ne peuvent être valable si l’avion a bien continué à voler si longtemps. Il faudra attendre encore deux semaines pour qu’une nouvelle zone très approximative soit définie grâce à ces nouvelles informations. Mais comment la Malaisie et Inmarsat ont-ils pu laisser les marines du monde entier déployer une armada (24 navires et 40 aéronefs !) dans une zone qui ne peut pas être la bonne pendant 10 jours ? Sans compter les dizaines d’images satellites partagées sur Tomnod et sur lesquelles plus de 8 millions de personnes vont se mobiliser pour réaliser des analyses !
De même, lorsque le flaperon ayant flotté jusqu’à l’Île de la Réunion est retrouvé fin juillet, les numéros de série qui s’y trouvent doivent être vérifiés pour valider son appartenance au MH370. Mais l’unique salarié de la société Casa (basée à Séville) capable d’authentifier cette pièce fournie par l’entreprise est en vacances. L’authentification attendra début septembre…
4) Les raw data
Il y a des peut-être des ratés, mais il y a aussi de bonnes raisons pour ne jamais fournir aux enquêteurs les données complètes et non retouchées, les fameuses « raw data« . Les données des radars militaires n’ont jamais pu être analysés par des spécialistes d’autres pays (sachant que la France est le fabriquant de ces systèmes, on peut penser que l’on avait quelques compétences). Inmarsat refuse à tous prix de donner accès à l’intégralité des échanges entre le satellite et l’avion. Une partie des communications VHF et Inmarsat ont été tronquées avant diffusion. Et la France ne partagera ses images satellites à la résolution maximale que 3 ans après l’accident.
Chacun a de très bonnes raisons pour ne pas être totalement transparent : Inmarsat pense que la vision de tous les échanges permettrait de pirater ses communications, la France ne veut pas laisser connaître les capacités de ses satellites espions et la Malaisie ne veut peut-être pas officialiser la portée réelle de ses radars. Mais ces informations auraient peut-être permis de réaliser de meilleures analyses, ou en tous cas plus rapidement. En attendant, tout le monde pense qu’il y a des choses à cacher même si ce n’est pas probablement le cas.
5) Les acteurs au rôle trouble
Les actions de certaines entités restent encore floues. Ce serait par exemple le FBI qui aurait récupéré les données du simulateur de vol fait maison du commandant de bord. Sauf que le FBI nie avoir été impliqué dans cette enquête et que la Malaisie aurait intérêt à laisser courir cette rumeur (voir cet article). Boeing refuse pour sa part de répondre à toute question des enquêteurs tant que la justice ne l’y contraindra pas. Et que dire de la Chine, dont le navire militaire chargé de détecter d’éventuels sons émis par les boites noire de l’avion a en réalité passé plus de 80% de son temps à espionner l’Australie, comme l’affirme un rapport du Joint Agency Co-ordination Centre ?
6) Les graves oublis
Suite à une fuite dans la presse de la part de la société qui gère les téléphones portables en Malaisie, les enquêteurs sont obligés d’admettre que le téléphone portable du copilote a bien été capté par le réseau terrestre au sud de Penang, il a « borné ». L’emplacement permet de valider la trajectoire initiale fournie par les radars, confirmant ces premières données. Mais pourquoi est-ce le seul téléphone détecté ? la Malaisie avoue finalement avoir « oublié » de vérifier si d’autres téléphones ont pu se connecter au réseau téléphonique terrestre au même moment.
7) L’incompétence
Alors que les recherches dans la « bonne zone » ne commencent que 15 jours après la disparition de l’avion, l’Australie affirme avoir retrouvé une nappe de carburant pouvant correspondre à celle du MH370. Sauf qu’aucun carburant ne peut rester ainsi immobile pendant des semaines et qu’il s’évapore avec le temps (ce n’est pas du fuel lourd comme dans les pétroliers mais du carburant aéronautique très volatile). Surtout qu’en s’étant abimé en mer dans cette zone, les réservoirs de carburant sont obligatoirement vides…
Et ces recherches sous-marines pleines de « faux positifs », avec des bateaux chinois et australiens qui annoncent avoir entendu les pings des boites noires le 6 avril, avant de réaliser qu’ils s’étaient simplement mutuellement détectés.
8) Les avancées permises par les bénévoles
Les « MHistes » sont les personnes qui se passionnent pour la recherche du MH370 (et j’en suis devenu un). Cette communauté qui compte plusieurs milliers de personnes est à l’origine de certaines des avancées de l’enquête, notamment des analyses techniques des signaux satellites et radar, l’étude des crustacés attachés aux débris retrouvés, la réfutation de pistes impossibles, la recherche et l’analyse des débris… Blaine Gibson est l’exemple le plus connu de ces bénévoles. L’homme a presque dévoué sa vie à la recherche des morceaux de l’avion échoués sur les côtes africaines, organisant des patrouilles avec les habitants locaux et retrouvant à lui seul plusieurs morceaux certifiés comme partie intégrante de l’avion disparu. Cet investissement et ces résultats supérieurs aux moyens mis à disposition par les Etats et les enquêteurs officiels sont pour certains considérés comme suspects. Comment accepter que quelques passionnés supplantent des organismes officiels et proposent des analyses pertinentes parfois des années avant les rapports officiels ? Le MH370 est le plus bel exemple de l’intelligence collective.
Et puis parfois, c’est juste la malchance. Le radar a très longue portée australien JORN (Jindalee Operational Radar Network) qui enregistre normalement les mouvements d’aéronefs dans le sud de l’océan indien était justement en panne le jour du crash. On le voit sur la carte ci-contre, il aurait pourtant permis de suivre une partie de la trajectoire supposée de l’avion…
Que retenir de positif ?
Amateurisme d’un pays qui n’a jamais mené d’enquête, incapacité à maîtriser une communication, volonté de faire le buzz et de faire des annonces avant les autres, la conduite de l’enquête autour du MH370 est mise en cause de toutes parts. Mais même si l’avion n’a malheureusement pas été retrouvé, il ne faut pas négliger les incroyables résultats obtenus, on pourrait presque parler de miracle tant les réponses sont déja nombreuses.
On connaît avec précision les premières évolutions de l’avion, ses échanges avec le satellite Inmarsat ont permis de prouver une coupure et un rétablissement électrique, l’analyse des signaux a fourni des indications sur l’heure de la panne d’essence ou sa vitesse de chute dans la mer. Les signaux Inmarsat qui ne contiennent aucune information ont pu être détournés de leur usage pour mesurer des distance et fournir une zone de recherche très certainement valables à quelques kilomètres près. Les débris retrouvés ont permis de valider globalement la zone de recherche, d’infirmer certaines hypothèses ou de connaître l’intensité des vibrations dans les derniers moments du vol. On ne saura probablement jamais à quel point toutes ces informations étaient justes, et sans retrouver les boites noires cette disparition restera un mystère sans égal dans l’histoire de l’aviation.
Chacun se construit une opinion sur le déroulement des faits qu’il ne pourra jamais étayer. J’ai personnellement l’impression que l’appareil a subi un problème technique et que les pilotes ne sont pas en cause, et que les mesures prises par Boeing (comme le remplacement des systèmes d’alimentation en oxygène des pilotes) permettront d’éviter qu’un tel événement se reproduise. Le Boeing 777 garde toute la confiance de tous ceux qui ont la chance de le piloter. Il transporte depuis plus de 20 ans des millions de personnes et l’événement unique qui a causé le MH370 ne doit statistiquement pas survenir à nouveau avant encore plusieurs décennies. Gageons que de nouvelles avancées auront alors permis de retrouver l’avion, comme la publication d’une incroyable étude sur les ondes sonores sous marines le 29 janvier 2019… des chocs dans la mer ont été enregistrés par au moins trois hydrophones et pointent vers une zone cohérente ! De nouveaux rebondissements sont donc peut-être encore à espérer dans les prochaines années…
Intervention dans le journal de 20h de France 2 sur ce sujet :
Bonjour et bravo pour vos efforts !
Vous n’abordez pas vraiment l’idée que tout ne puisse être qu’une manipulation, qu’est-ce qui vous fait encore penser que la version officielle est crédible ?
Bonjour, Le radar a très longue portée australien JORN en rade , idem pour l’ AEW&Co Australien ( un des 6 B 737 Modifié ) qui patrouillait dans la région maritime nord-ouest de l’Australie ras, très probablement le vol MH370 n’ est pas rentré dans sa zone de détection …..
Bonjour Luc, il ne suffit pas de ne pas avoir été détecté pour que l’avion n’ait pas accédé à l’espace aérien australien… un radar terrestre en panne c’est assez fréquent (d’autant que le JORN peut être tourné vers d’autres zones), mais à ma connaissance les AEW singapouriens ou australiens n’étaient pas en vol, avez vous des éléments contraires ? Les sites comme FR24 enregistrent quotidiennement ces vols militaires, les sites spécialisés comme https://www.adsbexchange.com/airborne-military-aircraft/ les répertorient même directement.
La vérité est ailleurs mais pas dans la partie sud de l’océan indien.
Je pense qu’il n’y a aucun élément qui puisse faire pencher vers une autre option…