Une nouvelle soufflerie givrante pour éviter les pannes et les accidents

Accumulation de givre sur le bord d’attaque d’une aile d’avion

La sécurité aérienne progresse toujours, c’est une règle universelle et une obligation réglementaire qui se durcit chaque année. Les moteurs sont ainsi de plus en plus résistants à l’ingestion de glace, d’oiseaux ou d’eau, les trains d’atterrissage doivent toujours mieux résister aux chocs et les avions doivent toujours mieux résister au givrage. Il existe trois piliers de la lutte contre le givrage :
– être capable de prévoir les conditions givrantes (prévisions météo et sondes de détection à bord des avions),
– posséder des moyens de protection de l’avion (procédure de dégivrage en enduisant l’avion d’un produit le protégeant –voir cet article-, chauffage des sondes…),
– élaborer des techniques de dégivrage si la protection n’a pas fonctionné (chauffage des bords d’attaque ou des entrées d’air, boudins gonflables pour faire tomber les éventuelles accumulations de glace, adaptation de l’altitude et de la vitesse…).

Les souffleries sont très utilisées en aéronautique, voici par exemple la plus grande soufflerie de l’ONERA : la S1MA de Modane. On y valide en général les profiles aérodynamiques des avions, par exemple pour réduire leur consommation et valider leur domaine de vol.

Afin d’améliorer les moyens de protection et les techniques de dégivrage, il est nécessaire de pouvoir valider certaines hypothèses et placer les équipements dans toutes les conditions existantes, sauf que celles qui nous intéressent ici ne surviennent que très rarement, sans oublier qu’il semble hasardeux de demander à des pilotes d’essais d’aller y voler dans le but d’y réaliser des tests. Il est donc nécessaire de développer des installations dédiées, comme la nouvelle soufflerie de l’ONERA (le centre français de recherche aérospatiale) dont la première pierre vient d’être posée. Imaginez le défi, il s’agit de reproduire au sol les conditions de vol des avions en vol, notamment :
– des températures allant jusqu’à -40°C,
– des vents pouvant dépasser les 150 mètres / seconde (plus de 500 km/h),
– la pression atmosphérique que l’on rencontre à 11.000m d’altitude.

Dans ces conditions, il sera possible de disperser à la fois des gouttelettes d’eau de différentes tailles (du brouillard jusqu’à de vraies gouttes), des cristaux et même des détachements de glace, ce qui permettra de vérifier que les nouveaux avions et équipements savent résister aux pires conditions imaginables.

Simulation numérique de l’ingestion de cristaux de glace dans un turboréacteur – projet CEDRE de l’ONERA

Cette soufflerie sera la plus importante d’Europe, et permettra à l’ONERA de rester le centre d’expertise mondial sur le sujet, avec une implication dans la totalité des projets européens :

  • MUSIC-HAIC pour le développement de modèles 3D pour le givrage en conditions cristaux,
  • SENS4ICE sur les technologies innovantes de détection de givre,
  • ICE-GENESIS, sur la modélisation du givrage en conditions neige
  • SLD pour lequel la nouvelle soufflerie givrante sera utilisée, un projet coordonné par Airbus.

L’ONERA collabore également avec la NASA sur le projet SUNSET2 d’étude des dégradations de performances aérodynamiques dues au givre.

Tous ces projets permettront de réduire encore le risque aéronautique lié au givre, et tous les acteurs de l’aéronautique mondiale profiteront des retombées de ces recherches. Il n’existe pas de concurrence dans le domaine de la sécurité aérienne, et toute avancée bénéficie donc à la totalité de la communauté aéronautique mondiale.

 

À propos de Xavier Tytelman

Ancien aviateur militaire aujourd'hui consultant sur les questions aéronautiques. Responsable et formateur au Centre de Traitement de la Peur de l'Avion (www.peuravion.fr). Tel : +33667484745
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