L'Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) a publié le 27 mars une recommandation à destination des compagnies aériennes afin qu'elles mettent en place la "règle des quatre yeux" dans le cockpit. Cela signifie tout simplement que si l'un des pilotes doit quitter son poste (pour une raison physiologique naturelle par exemple), un membre de l'équipage doit être présent dans le cockpit avec le pilote restant. Précisons bien entendu que les pilotes sont tout le temps aux commandes de leur avion, et que cela ne pose aucun problème à la conduite de l'avion si l'un d'entre eux devait s'absenter quelques minutes pendant le vol de croisière. Si cela arrive, le signal "attachez vos ceintures" s'allumera, car tout le monde doit être assis lorsque la porte du cockpit s'ouvre (contrairement à ce que l'on croit, le signal "attachez vos ceintures" n'est pas toujours synonyme de turbulences !). Précisons que cette règle était déja appliquée avant la catastrophe par toutes les compagnies américaines ainsi que par 3 compagnies européennes (Ryanair, Iberia et Finnair).
Voici un mail reçu avant hier, je crois qu'il est représentatif des interrogations de nombre d'anciens stagiaires :"Bonjour Xavier,Je suis étonnée de la solution qui est annoncée par toutes les compagnies qui veulent installer une hôtesse dans le cockpit pour remplacer un pilote sorti du dockpit. Comment une hôtesse de 60 kg a-t-elle une chance d'empêcher un homme déterminé de se mettre en descente ?Y aurait-il un aspect de ce concept qui m'échappe ?"
Voici ma réponse :"L'objectif n'est évidemment pas d'instaurer un rapport de force PNC / pilote dans le cockpit. Il faut savoir qu'une action manuelle d'ouverture de la porte ne peut être bloquée par le système de sécurité dont on a tant parlé. Cette règle de la présence d'une hôtesse a en réalité plusieurs objectifs :- en cas de malaise du pilote, cela permet d'alerter rapidement pour que le deuxième pilote puisse revenir (et je rappelle que le malaise du pilote n'est toujours pas exclu dans ce malheureux accident),- si un pilote a des idées noires, il est fort possible que la présence d'une personne avec lui soit suffisant pour éviter le passage à l'acte,- si le pilote aux commandes veut se mettre en descente, le PNC ne doit pas chercher à la contrer, il doit simplement ouvrir la porte pour demander de l'aide. Dans un cockpit, un pilote qui se mettrait en descente, reculerait son siège, détacherait sa ceinture, se lèverait (en faisant attention de ne pas se cogner la tête, le plafond de l'avion est bas), puis irait empêcher le PNC d'ouvrir la porte, cela prend du temps... un temps largement suffisant pour que le PNC puisse simplement ouvrir la porte afin de demander de l'aide."
La sécurité aérienne avance par a-coups et donne parfois l'impression que l'on attend les accidents pour apporter les réponses. Il n'en est bien sur rien, et tous les scénario imaginables ont en réalité déja été rencontrés dans les 100 ans d'aviation commerciales que nous avons vécu. Chaque panne est envisagée, chaque éventualité a une solution, c'est ce qui permet d'atteindre un niveau de fiabilité inégalé dans toute autre activité humaine. Le risque zéro n'existe donc pas, mais s'il est un environnement dans lequel on s'en rapproche, c'est bien l'aviation civile commerciale.